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1st OPHEN Summer Meeting

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147795

Le primat de la forme (μορφή/εἶδος) dans l'interprétation heideggérienne de la Physique d' Aristote

Claude Vishnu Spaak

pp. 173-243

Abstract

En suivant le fil des analyses heideggériennes du second livre de la Physique aristotélicienne, il devient vite clair que la matière est toujours justiciable d'un mode d'entrée en présence, et se trouve à ce titre soumise à la forme. Heidegger rappelle que ὕλη veut dire en grec « la "forêt', la "sylve', le "bois' où chasse le chasseur ». C'est à ce titre d'ailleurs que d'emblée, dans la langue grecque, la « ὕλη » trouve une place privilégiée dans le lexique de la production artisanale, puisqu'« en même temps, c'est le "bois' qui livre les madriers comme matériau de construction », et c'est donc « de là (…) que ὕλη devient la matière pour tout genre de bâtir et "produire' (herstellen) en général ». Cependant, pour que la matière soit constamment ressaisissable dans l'horizon de la production artisanale d'objet engageant savoir-faire, il faut que cette matière se donne tout d'abord à voir, et la possibilité d'une telle vision implique à son tour que toute ὕλη soit déjà structurée, informée dans un visage. Celui-ci est porté par l'être compris au sens de la φύσις, qui fait être tout d'abord le bois, l'amène à la présence manifeste par son mouvement d'éclosion propre. Il en va de même évidemment pour toute matière de provenance animale (où par exemple les peaux donneront le cuir, puis les vêtements), issue de la nature. Mais que dire de la pierre, qui peut servir par après de matière à l'édification de monuments ? À la différence de la ὕλη comprise littéralement (le bois), la matière inorganique, minérale n'est en général pas animée. Heidegger considère-t-il qu'elle relève également de la φύσις et de son mouvement d'éclosion ? La matière minérale n'est-elle pas inerte, en un sens qui ne s'identifie pas au mort, puisqu'elle ne correspond à rien qui ait pu être préalablement vivant ? Il n'est pas mention du statut de la nature inanimée dans la conférence de 1939, mais il va de soi qu'il n'y a pas d'exception pour la φύσις aux yeux de Heidegger, que son règne est omni-englobant et prévaut sur la totalité de l'étant en mouvement.

Publication details

Published in:

(2017) Interprétations phénoménologiques de la 'physique' d'Aristote chez Heidegger et Patočka. Dordrecht, Springer.

Pages: 173-243

DOI: 10.1007/978-3-319-56544-6_4

Full citation:

Spaak Claude Vishnu (2017) Le primat de la forme (μορφή/εἶδος) dans l'interprétation heideggérienne de la Physique d' Aristote, In: Interprétations phénoménologiques de la 'physique' d'Aristote chez Heidegger et Patočka, Dordrecht, Springer, 173–243.